Les déplacements professionnels sont fréquents… mais souvent mal encadrés.
- Temps de travail à rémunérer ?
- Indemnisation obligatoire ?
- Quelle gestion des temps de repos ?
Dans cet article, notre cabinet d’avocats en droit du travail vous apporte des réponses et conseils pratiques :
Le temps de déplacement est-il du temps de travail
Comme souvent en droit du travail, la réponse à cette question dépend de la situation. Plusieurs « temps de déplacement » sont à considérer :
1. Le trajet habituel domicile-travail
Le trajet quotidien effectué entre le domicile du salarié et son lieu de travail habituel n’est pas considéré comme du temps de travail effectif.
Ainsi, par principe, il ne donne donc lieu à aucune indemnisation, sauf disposition conventionnelle ou accord d’entreprise plus favorable.
2. Le déplacement vers un lieu de mission
Lorsque le salarié est amené à se rendre sur un lieu de mission différent de son lieu de travail habituel, le temps de déplacement est soumis à deux situations :
- S’il dépasse la durée habituelle du trajet domicile-travail, ce temps excédentaire peut être indemnisé selon les modalités prévues par l’entreprise. 
- Ce temps est considéré comme du travail effectif lorsque le salarié n’est pas libre de vaquer à des occupations personnelles (par exemple, s’il doit passer des appels professionnels, charger du matériel ou assurer une tâche en lien avec sa mission). 
Ce dernier point a été récemment confirmé par la Cour de cassation (Cass. Soc, 23 novembre 2022, n° 20-21.924).
A noter tout de même que le seul fait de rester joignable pendant un temps de trajet n’est pas suffisant à caractériser un temps de travail effectif (Cass. Soc, 13 mars 2024, n° 22-11.708)
3. Le déplacement entre différents lieux de mission
Le temps passé à se déplacer entre deux lieux de mission constitue du temps de travail effectif. Il est donc rémunéré comme tel, au même titre que toute autre période de travail.
les frais engagés pendant un déplacement sont-ils pris en charge ?
Les frais engagés pendant un déplacement du salarié doivent être pris en charge par l’entreprise s’ils constituent des frais professionnels.
La notion de frais professionnels correspond aux dépenses engagées par le salarié dans le cadre de son activité professionnelle et dans l’intérêt de l’entreprise
(exemples : déplacements, repas, hébergement, matériel, etc.).
Ces frais sont donc pris en charge par l’entreprise mais ne constituent pas un élément de la rémunération, ils ne figurent donc pas obligatoirement sur le bulletin de paie.
Enfin, ces frais professionnels sont exonérés de cotisations sociales, sous réserve du respect des règles fixées par l’URSSAF : justification nécessaire et respect des éventuels plafonds fixés.
L’employeur a donc l’obligation de rembourser les frais professionnels réellement engagés par le salarié. Cette prise en charge peut s’effectuer de deux manières :
- Au réel : le salarié présente des justificatifs de dépenses (factures, tickets, notes de frais, etc.), sur la base desquels il est remboursé du montant exact engagé. 
Dans ce cas, il est nécessaire de conserver l’ensemble des justificatifs qui devront être produits en cas de contrôle URSSAF.
- Sous forme d’allocation forfaitaire : l’employeur verse une indemnité fixe destinée à couvrir les frais. Cette allocation est exonérée de cotisations sociales dans la limite des plafonds fixés chaque année par l’URSSAF. 
Comment est traité le "temps libre" pendant un déplacement / séminaire ?
1. Principe général
Lorsqu’un salarié se déplace dans le cadre de son activité professionnelle (mission, séminaire, formation, déplacement client, etc.), il peut bénéficier de périodes dites “de temps libre”.
Cependant, l’entreprise n’est libérée du paiement du salaire que si le salarié est réellement libre de vaquer à des occupations personnelles, c’est-à-dire s’il ne reste pas soumis à l’autorité de l’employeur ni à des obligations professionnelles pendant cette période.
2. Conséquences en l’absence de réelle liberté
Si le salarié ne dispose pas de cette liberté effective, le temps concerné est alors considéré comme du temps de travail et doit, à ce titre, être rémunéré.
De plus, dans une telle situation, l’entreprise demeure responsable en cas d’accident ou d’incident survenu pendant ce laps de temps.
3. Exemples concrets
- Un salarié se blesse lors d’une activité organisée dans le cadre d’un séminaire d’entreprise (ex. : sortie ski, activité sportive, etc.) : la responsabilité de l’employeur peut être engagée (Cass 2e civ, 21 juin 2018, n°17-15.984) 
- Un salarié est victime d’un accident pendant un repas d’affaires ou même une sortie en discothèque : cet événement est également susceptible d’être reconnu comme un accident du travail (Cass. 2e civ. 12 octobre 2017, n° 16-22.481). 
Pour être dégagé de sa responsabilité, l’employeur doit prouver que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel (Cass. soc. 19 juillet 2001, n° 99-21.536)
Temps de déplacement : nos conseils pratiques
1. Rédiger une note d’information claire et précise
Il est recommandé à l’entreprise de rédiger une note d’information destinée à l’ensemble des salariés amenés à effectuer des déplacements professionnels.
Cette note pourra notamment permettre de :
- Définir clairement les temps pendant lesquels le salarié est libre de vaquer à des occupations personnelles, et ceux considérés comme du temps de travail effectif ; 
- Préciser les règles d’indemnisation applicables aux temps de déplacement et aux frais professionnels ; 
- Énoncer les obligations réciproques de l’employeur et du salarié lors des missions à l’extérieur. 
Une communication claire et documentée permet de limiter les risques de contestation et d’assurer une application uniforme des règles au sein de l’entreprise.
2. Mettre en place une fiche “note de frais” détaillée
Afin de prévenir tout risque URSSAF, l’entreprise devrait également prévoir une fiche de note de frais complète et standardisée.
Cette fiche doit permettre de :
- Détailler la nature des dépenses engagées (repas, transport, hébergement, matériel, etc.) ; 
- Indiquer les montants, dates et justificatifs associés ; 
- Être conservée et archivée en cas de contrôle URSSAF ou d’audit interne. 
Une gestion rigoureuse des notes de frais garantit la transparence et la conformité des remboursements.
3. Organiser un suivi en cas de déplacement prolongé
En cas de déplacement sur plusieurs jours consécutifs, il est conseillé d’organiser un échange ou un bilan entre le salarié et son responsable.
Cet échange viserait à :
- Vérifier le respect des temps de repos et de récupération ; 
- Identifier d’éventuelles difficultés liées aux conditions de déplacement ou d’hébergement ; 
- Prévenir les risques de surcharge ou de non-conformité avec la réglementation sur le temps de travail. 







